Côte d’Ivoire/Mariage à distance : des femmes mariées racontent leur calvaire

A adjawi, un sous-quartier de la commune de Port-Bouët, dame A.M est venue s’y cacher à cause de la honte. Aujourd’hui âgée de 40 ans, elle n’a jamais connu son mari qui vit en hexagone. Ayant contracté un mariage familiale à l’âge de 20 ans avec un cousin, jusqu’à ce jour, elle ne l’a jamais connu.

Lorsqu’elle veut demander le divorce, des membres de la famille la met face aux exigences de la tradition. Peinée, elle a quitté le domicile familiale pour aller vivre dans ce quartier. Elle soutient qu’elle a coupé les liens avec les membres de sa famille et mène sa vie comme elle l’entend. ‘’J’ai trop souffert. De nombreux hommes sont venus pour me proposer le mariage, mais les parents font savoir que mon époux vit en Europe’, confie-t-elle.

TH, originaire du centre ouest de la Côte d’Ivoire, relate son calvaire. Elle soutient qu’aujourd’hui, elle est retournée en famille pour vivre avec ses enfants car elle a tout perdu. Commerçante de vivriers au marché gouro d’Adjamé, elle a réussi à économiser pour faire partir son bien-aimé en Europe. Celui-ci, pendant les trois premiers mois de son arrivée en occident, l’appelait constamment et lui faisait des promesses. Contre toute entente, il a interrompu la communication et ne lui envoie plus d’argent pour subvenir aux besoins des enfants. N’étant plus en mesure de s’occuper de ses enfants, elle est allée voir sa belle famille pour lui exposer la situation. N’ayant reçu aucune solution de leur part, elle a été obligée de quitter son domicile de location pour vivre en famille.

Natogoma Traoré, mère de trois enfants dont deux garçons et une fille est mariée depuis 18 ans. Depuis 11 ans, son mari est parti en Autriche pour avoir une vie meilleure et subvenir aux besoins de sa famille. Même si la communication ne s’est jamais interrompue entre les deux, son mari, durant ces 11 années, n’a pas foulé le sol ivoirien. Selon ce qui se raconte, son époux serait dans une idylle avec une autre fille en Europe. Tandis qu’elle n’a pas droit à l’amour . Ses faits et gestes sont surveillés par des parents et proches de son mari qui lui transmettent des informations.

Une proche qui a gardé l’anonymat raconte le calvaire que vit Natogoma Traoré, notamment des problèmes de ventre car cela fait longtemps qu’elle n’a pas eu de rapport sexuels.

‘’Cette dame qui se marie aujourd’hui et moi, nous avons fait l’école confessionnelle primaire ensemble. Ayant contracté un enfant avec un homme qui vit désormais en Europe, celui-ci lui a fait des fausses promesses et elle est restée plus d’une dizaine d’années sans accepter les avances des hommes. Mais, après avoir compris les conseils des ainées, la voici qui se marie aujourd’hui’’ , a témoigné un Iman, lors d’un mariage d’une Dame oscillant entre 45 et 50 ans, à Marcory.

Quel impact ?

Il arrive très souvent que des parents marient leur fille à ces personnes pour des intérêts personnels. Il est évident que ces situations ont des impacts sur la vie des personnes concernées, notamment le divorce, la haine, la division des familles et parfois de pratiques mystiques.

Certaines femmes pour l’honneur et la dignité, préfèrent demander purement et simplement le divorce, d’autres par contre, préfèrent rester dans ce mariage virtuel tout en commettant l’adultère.

Une affaire de tradition

Imam Sanogo souligne qu’il est difficile pour les Africains d’abandonner certaines pratiques traditionnelles. Dans des familles, ni la fille, encore moins sa mère ne sont consultées pour l’officialisation d’un mariage. Il suffit que les hommes décident, et les informent pour que le mariage se célèbre.

La société actuelle de nombreuses femmes se sont retrouvées dans ces cas de situation à cause de la tradition. Elles choisissent de vivre cette situation pour que la société dise qu’elles sont mariées à des conjoints vivant en Europe. Au fil années, elles sont confrontées à la réalité et sont obligées de fuir à cause de la honte.

A en croire le guide religieux, la religion musulmane recommande d’unir deux personnes qui s’aiment et non les obliger à former un couple.