
Abidjan, le mercredi 19 février 2025(ivoire.ci)-Après une carrière internationale en aéronautique et automobile en France(chez Airbus) et aux Etats-Unis, Sali Ouattara, dans le groupe Brandt et Hutchinson, est directrice générale adjointe de Sah Analytics (une entreprise d'intelligence artificielle et de cybersecurité) depuis 2023 après avoir rejoint le groupe en 2021. Dans cet entretien, Mme Ouattara parle des enjeux stratégiques du Salon de l'intelligence artificielle, de la Défense et de l'Espace (SiADE) et sa vision pour l'Afrique, en général et de la Côte d'Ivoire, en particulier.
Du 20 au 21 février prochains, vous organisez un grand évènement à Abidjan, quel est l'objectif visé à travers le SIADE 2025 ?
Sah Analytics organisé avec ses partenaires (Oneci, Artci et le Vitib), le Salon de l'Intelligence artificielle, de la Défense et de l'Espace (SIADE). C'est un événement placé sous le haut patronage ministre d'État, ministre de la Défense, Téné Brahima Ouattara. Notre vision du SiADE, c'est de dire, il y a beaucoup de personnes aujourd'hui qui travaillent dans l'IA; mais dans le quotidien de tout ivoirien comment faire en sorte à donner une visibilité sur ce que nous sommes en train de faire. Le SIADE vise aussi à permettre à la Côte d'ivoire d'avoir un outil hautement stratégique, de même que l'Afrique, en relation avec ses partenaires extérieurs, que ce soit les États Unis, la France où l'Asie. Le SIADE doit être une plateforme de collaboration qui va permettre aux professionnels de partager leur savoir-faire, leur vision et sceller des collaborations pour mieux adresser les problématiques actuelles. Mais aussi de permette aux jeunes (élèves et étudiants) d'être plus près de ce qui se fait aujourd'hui dans ces domaines. Donc ces deux journées vont réunir les acteurs du secteur public et privé et permettre d'avoir une vision holistique de ciment attaquer l'espace et adapter à 'nos réalités et sceller des collaborations qui vont nous permettre d'atteindre nos objectifs du futur.
Quels sont les grandes articulations de ce salon ?
Nous attendons environ 50 000 participants au Parc des expositions d'Abidjan dont une vingtaine d'organisations qui viendront de l'extérieur: France, États Unis, Canada, Pakistan, Inde, Corée du Sud, Afrique du Sud, Sénégal....car ce sera l'occasion d'expérimenter des solutions déjà développées ailleurs mais qui peuvent être adaptées au niveau local. Par exemple, il y a des algorithmes de reconnaissance faciale pour les Chinois et pour les personnes de peau blanche qui ne sont pas forcément adaptés aux Africains. Il faut donc se réapproprier ces outils pour les adapter à nos réalités. Nous avons également les outils de correction du cancer, notamment le cancer de sein qui ne sont pas adaptés à nos réalités africaines. Donc, le 1er jour sera orienté professionnel avec des panels, des tables-rondes, des sections parallèles sur la Défense et le volet spatial, des Keynotes autour de la santé, de l'agriculture, du transport, l'énergie, des B&B, des expositions. La deuxième journée, le salon sera ouvert au grand public avec la participation de plusieurs écoles et des universitaires.
Un hackathon est-il prévu. Que remporte le gagnant ?
Oui, il y a un hackathon pour booster les jeunes dans ce domaine à proposer des projets innovants en lien avec le salon. Les inscriptions sont ouvertes. A l'issue de ce concours, la startup la plus innovante sera récompensée. Il aura surtout un accompagnement technologique de Sah Analytics en termes d'expertise et tout ce qui est recherche de financement et après il y a un accompagnement financier.
Quels sont les atouts de la Côte divoire et de l'Afrique dans cet écosystème ?
La Côte d'Ivoire et l'Afrique ont un grand rôle à jouer sur la question de l'intelligence artificielle. Pour développer des outils comme le Chatgbt, il faut plusieurs éléments. D'abord, il faut du génie et oser créer. Il ne faut pas avoir peur de se lancer en premier. Il faut être avant-gardiste. Et, il faut la vision de l'Etat mais aussi la vision des acteurs du domaine. Quelle est la stratégie adopter pour être incontournable dans cet écosystème ? Puis, il faut les infrastructures parce que les solutions vont s'appuyer sur ces infrastructures, en termes d'accès internet ou les infrastructures Telecom et l'énergie et évidemment les moyens investissement. Aujourd'hui, on ne doit avoir peur de dire qu'on a tous ces éléments. On a le génie, on a beaucoup d'experts qui sont formés localement ou à l'international qui vont être les acteurs ou moteurs de cette hub technologie. On a aussi des jeunes, des étudiants qui n'attendent qu'à être formés. Nous travaillons beaucoup avec les écoles locales en Côte d'Ivoire ( Esatic, Inp-Hb, Ensea) avec qui nous sommes partenaires, tout ça pour que nous ayons demain des experts qui vont travailler dans ce domaine, sur ces outils ou solutions qui vont booster le développement de la Côte d'ivoire. Au niveau des infrastructures, on voit qu'il y a beaucoup d'investisseurs qui sont faits ces dernières années pour permettre aux entreprises du domaine de pouvoir se développer, tant dans le secteur public que dans le secteur privé. Avec Sah Analytics, nous avons notre Data Center (privé) qui nous permet de garder nos données qu'on utilise localement pour nos projets et tirer des avantages du cloud. Enfin, nous avons investi énormément ces dernières années dans le secteur de l'espace pour nous permettre d'avoir accès à tout ce qui est imagerie satellitaire pour adresser les problématiques dont je parlais plus haut (agriculture, sécurité, mobilité, éducation) et la dernière chose c'est l'investissement. Cela rejoint le dernier point que je viens de citer. On le dit souvent l'IA coûte cher, on n'a pas les moyens mais aujourd'hui avec les dernières innovations on peut dire que l'IA est accessible à tous, il suffit une volonté commune des acteurs du secteur, une volonté commune des États surtout de l'Etat de Côte d'Ivoire pour booster l'Afrique à prendre sa place dans ce développement. On n'est pas en retard. On doit pouvoir prendre la place qui nous revient c'est-à-dire être avant-gardiste dans ce secteur et je pense que la Côte d'ivoire est bien partie pour prendre sa place, en tout cas Sah Analytics est inscrite dans cette logique.
Comment l'intelligence artificielle impacte concrètement le quotidien des populations ?
Aujourdhui, l'IA n'est plus un rêve, c'est une réalité. En Côte d'Ivoire, par exemple, l'IA, nous a permis de lutter contre la Covid-19. Sah Analytics a beaucoup travaillé avec le ministère de la santé pour contenir la Covid. L'intelligence artificielle nous a permis de nous assurer que les personnes qui devraient être confinées le sont bien et de ramener ceux qui ne l'étaient pas grâce à des analyses poussées, aujourd'hui il y a des imageries satellitaires qui permettent de lutter contre la pêche illégale. Cela veut dire qu'on est en train de travailler sur des éléments réels en utilisant l'IA. Nous sommes en train de travailler sur plusieurs projets de ce genre.
Quelle est la place de l'humain dans l'Intelligence artificielle ?
On ne peut pas parler d'IA sans parler de l'humain. C'est en ce sens qu'au-delà du fait que nous accompagnons l'Etat de Côte d'Ivoire et le secteur privé depuis l'année dernière. Sah Analytics a entamé une initiative avec le ministère de L'éducation nationale et des partenaires coréens qui vise à former les élèves de Cm1 à la robotique et la programmation. La première phase de ce projet ( la phase pilote) a permis de former les élèves de 3 régions : Sinémariali, Ferke et Boundiali et progressivement nous allons l'étendre le périmètre d'intervention dans d'autres villes de la Côte d'Ivoire). C'est un projet qui permet de démocratiser l'usage de l'image, de préparer les générations futures, les emmener à s'apprêter a utiliser cette nouvelle technologie et à être les experts de demain. Donc, ce sont toutes les initiatives qui nous permettent de dire que l'A est dans notre quotidien. Nous sommes un acteur majeur du domaine et notre rôle c'est d'accompagner l'Etat de Côte d'Ivoire et le secteur privé à faire de l'IA un levier de développement efficace.
Quel retour vous avez de la sensibilisation et la formation des élèves à l'intelligence artificielle ?
Déjà nous avons des enfants qui fabriquent des outils liés à l'agriculture, à la ventilation des maisons automatiques. Il y a donc cet esprit analytique qu'ils ont commencé à développer et c'est très prometteur. Et puis, les outils qu'ils construisent en termes de programmation pour être utilisés par les startups constituent des éléments qui vont booster l'écosystème.
Dites-nous, à quel moment un enfant du primaire ou du secondaire en Côte dIvoire pourra-t-il fabriquer des drones ou des robots et autres ?
On a tendance à minimiser l'esprit analytique des enfants mais vous savez les enfants ont cette capacité et curiosité à découvrir, les élèves de Cm1 avec lesquels nous travaillons c'est autour de 9 ans 10 ans. On a des programmes, autour de 6 ans, l'enfant peut commencer à programmer, à faire des programmes automatiques pour découvrir tout ce qui se fait en termes d'algorithme. Donc plus on commence plus tôt plus cet esprit analytique, algorithmique est ancré dans le savoir-faire de ces enfants qui plus tard seront les experts qui vont accompagner les entreprises locales et L'Etat dans la mise en place de toutes les stratégies en termes de leadership technologique. Un enfant quand il commence à être initié tôt , très rapidement il va pouvoir mettre en place ces composants qui vont constituer un drone. Donc, très jeunes, les enfants vont pouvoir mettre en place des outils. Même s'ils les considèrent comme des passe-temps mais réellement ce dont des éléments qui vont compter pour l'avenir. Tout dépendra de la capacité analytique de ces jeunes. Ce qui va peut-être manqué, c'est cette structuration pour rendre l'outil professionnel et industrielle et nous sommes là justement pour les accompagner.
Avez-vous déjà implémenté des solutions dans ce sens ?
Nous avons déjà des solutions qui ont été implémentées dans le cadre du programme que nous sommes en train de déployer. L'année dernière, on a eu beaucoup de retours, les équipes sont en train de travailler pour sélectionner quelques-unes de ces solutions que nous allons présenter lors des prochaines éditions du salon.
Que e représente le SIADE pour la Côte d'ivoire, en termes de retombées ?
Ce salon est une opportunité stratégique pour la Côte d'ivoire d'affirmer son leadership dans les secteurs clés : l'IA, la défense et l'espace. Ça sera l'occasion de réfléchir sur des stratégies communes de développement et de sceller les partenariats stratégiques. S'agissant de l'IA, plusieurs verticales seront abordées lors de ce salon : la mobilité, la santé, l'agriculture et d'autres aspects. Au niveau de la défense, ce salon va nous permettre de se doter d'outils opérationnels pour la protection des infrastructures critiques. Le spatial pour beaucoup d'africains, c'est encore lointain, mais je pense que c'est maintenant et ce salon doit nous permettre de mettre en avant les outils qui sont indisponibles, voir comment on peut utiliser le spatial pour adresser les défis liés au développement économique.
Parlez-nous de Sah Analytics ?
Créée en 2019, Sah Analytics International est une entreprise spécialisée dans la Data Analytics et les projets satellitaires. L'IA est notre corps de métier mais aujourd'hui nous attaquons d'autres domaines comme l'espace pour être avant-gardiste sur des problématiques liées au satellite, pour justement adresser les problématiques de développement humain pour la Côte d'ivoire, que ce soit au niveau de l'agriculture, de la pêche légale ou la sécurité. Nous sommes là pour pousser ces sujets et accompagner le développement de notre pays, afin d'assurer la souveraineté du pays dans ces technologies.
Pour terminer, qu'elle est aujourdhui votre vision pour la jeunesse ivoirienne en termes d'intelligence artificielle ?
Aujourd'hui, il faut se développer avec l'intelligence artificielle, aucune économie ne peut se mettre en marge de l'IA. Si on ne va vers l'IA, elle viendra à nous. C'est donc à nous de nous approprier cet outil et se former pour être un acteur du développement de toute cette industrie qui est train de se développer autour de nous. L'IA permet d'accélérer le développement, en termes de gain de temps et d'efficacité. Et Sah Analytics est là pour accompagner l'écosystème ivoirien en matière d'IA, de la biotechnologies, cloud et cybersécurité. Nous accompagnons le gouvernement dans des domaines tels que la santé, le tourisme, la sécurité, la défense et l'espace. Nous apportons un plus en matière technologique. Tout cela grâce à notre président directeur général (PDG), Dr Yaya Sylla, nos collaborateurs et partenaires qui sont toujours à nos côtés pour nous accompagner; afin de déployer des solutions performantes à qui je voudrais dire grand merci. Nous sommes une entreprise jeune, 5 ans d'existence, mais nous avons réussi à gagner la confiance du secteur public et du secteur privé. Je pense que la jeunesse ivoirienne s'est déjà appropriée l'intelligence artificielle parce que tout ce que nous faisons à Sah Analytics ce sont les jeunes ivoiriens qui sont derrière. On a énormément de jeunes curieux et compétents. Et comme, je le disais avec les partenariats que nous avons avec Ensea, Inp Hb, Esatic, on voit que nous avons de la crème, il suffit de les accompagner pour être des experts de haut niveau demain. Cette jeunesse est là, le génie est là, la vision est là. Ensemble, nous allons être les acteurs du développement de l'IA en Côte d'Ivoire.