
Abidjan, le jeudi 13 mars 2025(ivoire.ci)-Le ministre de l’Intérieur et de la Sécurité Vagondo Diomandé a défendu le projet de loi portant ratification de l'ordonnance N 2014-368 du 12 juin 20024 relative à l'organisation de la société civile, le lundi 10 mars 2025, à l'assemblée nationale. Il a été adopté par la majorité des députés de la commission des affaires générales et institutionnelles (CAGI). Sur 27 élus présents, 17 voix pour et 10 contre. Mais cette ordonnance est dénoncée par des ONG et des confessions religieuses qui voient en cette loi une menace de la liberté d'expression et surtout une immixtion des pouvoirs publics dans leur fonctionnement.
Il a expliqué que cette ordonnance est "une avancée". " Cette loi qui vient abroger les dispositions de la loi 1960 relative aux associations pour notre pays est important dans le processus de modernisation de son cadre juridique et de son adaptation au contexte actuel », a-t-il soutenu.
" Je me réjouis des débats enrichissants que nous avons eus qui témoignent de l'intérêt qu'accorde la représentation nationale à la promotion des libertés. Je voudrais adresser à nouveau ma gratitude aux députés pour leur grande contribution à la réalisation de l'ambition du président Ouattara de faire de la Côte d'Ivoire, un pays de paix de solidarité et de progrès », a insisté M. Diomandé.
C’est donc en application de cette loi votée par le Parlement que le président ivoirien a signé l’ordonnance n°2024-368 du 12 juin 2024 relative à l’organisation de la société civile qui participe de la mise en œuvre de son programme économique et social.
Motifs de cette ordonnance
Selon les pouvoirs publics, plusieurs motifs expliquent et justifient le recours à une ordonnance, à savoir le besoin de redynamiser les Organisations de la société civile (OSC) et la nécessité d’amplifier leur contribution au développement socio-économique de notre pays. Il y a également, selon les termes de l’ordonnance, les impératifs d’ordre sécuritaire et d’ordre public; les exigences de la lutte contre le blanchiment de capitaux et le financement du terrorisme. Sur le dernier aspect en matière de lutte contre le blanchiment de capitaux, le financement du terrorisme et la prolifération des armes de destruction massive (LBC/FT/FPM), la Côte d’Ivoire était tenue d’intégrer dans sa législation sur les OSC, des dispositions relatives à la lutte contre le LBC/FT/FPM, au titre des obligations à respecter par les Organisations à but non lucratif (OBNL). Mais pour améliorer la conformité technique de son dispositif de lutte LBC/FT, le pays devait soumettre le 2 septembre 2024 au Groupe d’Action Financière International (GAFI), son rapport de post-observation (POPR). Il fallait donc intégrer ladite ordonnance dans sa première soumission en juillet 2024, au titre des efforts du pays dans la lutte contre la LBC/FT. Le non-respect dans les temps de cette exigence aurait été extrêmement préjudiciable pour le pays.
Aussi le recours à une ordonnance permet-il de clarifier les différentes formes d’OSC ; ce qui jusque-là étaient régies par la loi n°60-315 du 21 septembre 1960 relative aux associations. Et donnait à chaque type d’OSC d’avoir sa singularité propre.
Avec donc cette ordonnance, précise l'autorité publique, l’objectif n’est pas de démultiplier les textes et d’avoir pour chaque OSC un texte spécifique ; le but poursuivi est plutôt d’avoir un texte unique qui rappelle les règles communes à toutes les OSC avant de préciser les points spécifiques à chaque OSC.
« L’intérêt pour l’Etat, par l’adoption de cette ordonnance étant de garantir pour l’ensemble des organisations de la société civile, un cadre juridique cohérent et adapté au contexte actuel, de nature à assurer un meilleur encadrement desdites organisations, et à renforcer leur opérationnalité conformément à leurs objectifs », fait-on savoir.
Par ailleurs, l’ordonnance innove sur plusieurs points majeurs, notamment: la définition d’une nouvelle typologie d’associations adaptée au contexte actuel. Elle distingue les ONG, les organisations cultuelles et les fondations des associations ordinaires; permet la clarification et la simplification des règles relatives à la création des OSC; renforce le contrôle assuré par l’Etat en matière de création, d’organisation et de fonctionnement des OSC; la définition de règles de gouvernance des OCS conformes aux standards internationaux et aux bonnes pratiques; le renforcement du contrôle interne de l’OSC de sorte à permettre aux membres de se prémunir contre les dérives constatées par le passé; le contrôle du financement des OSC; la création d’un cadre de concertation entre l’Etat et les OSC; la mise en place d’un mécanisme de suivi-évaluation des OSC; la détermination des avantages de toute nature reconnus aux OSC etc.
Immixtion de l’État
Avant l’adoption de cette loi, des ONG et des associations de l'Église protestantes et évangéliques étaient montées au créneau pour dénoncer une immixtion de l’État dans leur fonctionnement.
"Nous sommes des émanations religieuses. Notre conviction, c'est qu'il y a deux genres. Il faudrait que toute loi qui soit prise puisse tenir en compte cette liberté là et créer un cadre qui permette à tout le monde d'adorer Dieu comme il le désire.'', a dénoncé le pasteur Antoine Zando via dw.com relativement aux dons et à la promotion du genre au sein de l’église.
De son côté, le pasteur Mohamed Sanogo est catégorique : "L'État doit veiller à ce que notre croyance ne vienne pas entraver l'ordre public. Si dès l'instant nos croyances n'entravent pas l'ordre public, il devient vraiment très malsain de vouloir attaquer la croyance.'', rapporte toujours dw.com.
"La constitution elle-même dit que la société civile doit promouvoir la démocratie. Article 26 de la constitution. Quand on finit de dire ça, on a constitutionalisé la société civile. Donc on finit de constitutionaliser la société civile, pour lui permettre de jouer son rôle, ce n'est pas une ordonnance. Mais nous pensons qu'en l'état, ce projet de loi de ratification qui a été déposé devant les parlementaires, nous allons l'attaquer devant le conseil constitutionnel.'', a confié Narcisse Lapké, président d'Initiative vision, une fédération de mouvements de la société civile, à dw.com.