
Abidjan, le samedi 19 avril 2025(ivoire ci)-Cette fin de semaine marque la célébration de la Pâques 2025( le dimanche ). Comme chaque année, cette fête, qui est devenue un moment de retrouvailles en pays baoulé sous l’appellation idiomatique de « Paquinou », ne déroge pas à la ferveur traditionnelle cette année. Surtout avec les différentes gares routières qui ne désemplissent pas de ressortissants du V Baoulé, s’activant à rejoindre leurs villages respectifs.
Dans le Gbêkê, le N’zi, le Bélier, l’Iffou, la Marahoué, la promesse d’une célébration des grands jours est sur toutes les lèvres. Il faut surmonter les appréhensions et l’angoisse grandissante dans un contexte préélectoral qui exhume les vieux démons, soupire-t-on. Cependant, les conditions pénibles du voyage laissent un goût amer.
Longues files d’attente devant les guichets
L’atteinte du guichet pour se procurer un ticket de voyage est un calvaire pour chaque voyageur. Presque dans toutes les gares routières, les longues files d'attente sont multiples. Le constat est le même. Femme, homme, vieux, jeune, etc. chacun est dans l’obligation d’attendre pour obtenir le sésame qui conduira à l’espoir. " Je suis dans le rang depuis 12 heures. Voyez l’heure qu’il fait. Il est 14 heures et rien ne bouge. Le service est lent et c’est embêtant. Je suis déjà venue et avec les bagages et les enfants. Ce n’est pas facile mais nous n’avons pas le choix", fait savoir Ange Koffi, qui espère avoir le ticket pour la ville de Diabo (Bouaké). Et cet spectacle est identique dans les toutes les gares des compagnies de transport, à savoir UTB, SBTA, TSR, en cette période.
Un brouhaha sans fin
Partout dans les gares routières d’Abidjan, l’ambiance reste la même. Sous un soleil de plomb, Bagages, foultitude de personnes, véhicules de transport, taxis transportant les voyageurs, tout est confondu. Un brouhaha sans fin à casser le tympan. Les devantures des gares restent les seuls espaces pour abriter les voyageurs. Levés ou assis sur leurs bagages, le visage crispé, ils sont impuissants face aux cris des vendeurs ambulants, des klaxons des voitures et engins à deux ou trois roues et des odeurs suffocantes parfois. Dans ce tohu-bohu : pleures terrifiants des bébés donnent un cachet particulier au vacarme des gares routières.
" Comme vous le constatez, nous sommes dans un bruit qui ne dit pas son nom. Rien n’est organisé ici. On a le ticket mais on ne sait pas avec qui on peut avoir la bonne information sur le départ. Avec tout ce cafouillage, si on est distrait, on risque de se tromper de départ. C’est très compliqué de voyager dans ces conditions. Les enfants ont faim, on est obligé de s’arrêter sous le soleil. C'est vraiment très compliqué. Je suis fatigué", a expliqué Jules Yao, qui attend le douzième départ de Bouaké.
Réservations, une promesse stérile
Dans l’optique de faciliter le transport des voyageurs, certaines compagnies ont proposé des services de réservation. Certains tickets ont été soldés en ligne, d’autres physiquement. Depuis plus de trois à quatre jours, des voyageurs ont fait leur réservation. Ceux-ci, malgré leur ticket en main avec l’heure précise, demeurent dans la longue l’attente, tout en espérant avoir un car. En plus, bien qu'ils aient pris le ticket à l’avance, ils sont dans les mêmes conditions que les autres.
" Je suis à la gare depuis 05 heures. J’ai fait une réservation le lundi. Le départ était prévu pour ce vendredi à 07 heures, il est 14 heures. Je suis encore là sous ce chaud soleil. Je ne comprends plus rien. Ce n'est pas sérieux", a confié Alexis Kouamé. Même son de cloche chez Pauline Brou qui a pris un ticket en ligne exprès qu’elle a soldé à hauteur de 8.000 Fcfa depuis mercredi dernier pour un départ prévu ce vendredi à 7 heures 30.
Cause du désordre : les convois
Plusieurs causes sont à la base du calvaire des voyageurs de paquinou. Parmi celles-ci, les organisations de convoi qui se taillent une bonne part des départs. Ce moment de festivité et de retrouvailles également constitue pour les associations et les mutuelles de village une occasion de retrouver la base (village). Dans l’optique de faciliter le voyage, il arrive des fois que les responsables de ces associations organisent des convois qui sont soldés plusieurs semaines en avance. Alors, la mise à disposition de certains véhicules aux différents convois cause un véritable déficit des cars pouvant transporter les voyageurs qui se rendent dans les gares.
"En réalité, les compagnies sont responsables. Elles mettent tous les véhicules en convoi. Il y a même eu une association que je connais qui a commandé quatre cars. Si dix villages doit faire autant, comment allons-nous en sortir. Ce n'est pas sérieux", a déploré Jean-Luc Djé Kouamé alias Timiklèkan, un artiste tradi-moderne du V Baoulé qui attend d’embarquer pour une prestation à Tiébissou.
La fête de paquinou est un fait de retrouvailles très prisée par le peuple Baoulé. Bien que les difficultés de voyage persistent à défaut de véhicules, personne ne veut se faire raconter cet ultime épisode de leur vie.
"Allons au village, Paquinou Yôfai (Pâques est chic)".